La Presse – Patrimoine: autres temps, autres vocations
Par Danielle Bonneau
Avec leurs hauts plafonds, leurs murs de brique et leur façade souvent très travaillée, les immeubles anciens ont la cote. En plus ou moins bon état, plusieurs sont remis à neuf et transformés en logements par des entrepreneurs qui n’ont pas froid aux yeux. Les édifices perdurent et les quartiers ne s’en portent que mieux.
Certains promoteurs à l’oeil aiguisé recherchent activement des propriétés construites à une autre époque, abandonnées ou sous-utilisées, pour leur donner une seconde vie. Ils carburent à ce genre de défi, qui leur permet de se distinguer.
DevMcGill: des façades magnifiques
DevMcGill figure parmi les promoteurs qui ont fait de la transformation de bâtiments patrimoniaux une spécialité. Le Caverhill et le 100 McGill, dans le Vieux-Montréal, ainsi que le Couvent Outremont, sur un flanc du mont Royal, sont trois des reconversions en copropriété réalisées par l’entreprise.
Avec différents partenaires, elle poursuit dans la même veine en réalisant à la fois le Castelnau, à côté du parc Jarry, et le St-Dominique, dans le Quartier des spectacles. Alors que le premier met en valeur l’ancienne Institution des sourds-muets, construite entre 1916 et 1921 par les Clercs de Saint-Viateur, le second entraîne la rénovation et la restauration de l’ancienne brasserie Ekers, construite en 1894 et classée bâtiment à valeur patrimoniale exceptionnelle.
«Ces projets sont intéressants, car ils sont uniques, souligne Stéphane Côté, président de DevMcGill. Il faut adapter l’intérieur de la coquille à un nouvel usage, avec toutes les contraintes que cela entraîne.»
«Les façades, par ailleurs, sont magnifiques. Celle du Castelnau, par exemple, est très imposante. Les vieilles pierres sculptées rappellent l’Europe. Ce cachet bien particulier rejoint une certaine clientèle. Nous aménageons d’ailleurs le centre sportif dans le sous-sol de l’immeuble patrimonial pour que les copropriétaires des trois édifices construits autour y aient aussi accès.»
Projets Europa: les plus beaux terrains
Projets Europa, qui a entièrement rénové plusieurs immeubles dans le Vieux-Montréal, achèvera au début de 2014 la reconversion en copropriété du Lancashire, construit avec moult détails en 1899, rue Saint-Jacques, pour la compagnie d’assurances London and Lancashire.
Puis, vers avril prochain, l’entreprise s’attellera à la transformation de l’ancien hôtel Ottawa, établissement hôtelier de première classe bâti quelques rues plus loin dans les années 1860, près de la rue McGill. Comptant 59 condos, ainsi qu’un restaurant et un marché avec boulangerie, charcuterie et fruiterie au rez-de-chaussée, celui-ci deviendra alors le Penny Lane.
Projets Europa a aussi acquis le marché Saint-Jacques, rue Ontario. Non seulement 14 maisons en rangée réparties
sur 3 étages et 20 condos seront-ils aménagés au-dessus du marché, mais la firme veille à la relance de l’activité commerciale au rez-de-chaussée. Pourquoi se donner tant de mal?
«Les emplacements stratégiques avec les plus belles vues ont été choisis quand il y avait beaucoup de terrains disponibles», explique Jean-Pierre Houle, président de Projets Europa.
Autre avantage: les façades, souvent très travaillées, sont d’une qualité qui ne pourrait pas être reproduite aujourd’hui. «Les bâtiments ont été réalisés avec les moyens de l’époque, alors que les taux horaires et la disponibilité des ouvriers n’étaient pas les mêmes», précise-t-il.
Pur Immobilia: sauter sur l’occasion
Rue Saint-Jacques, près de la place d’Armes, la structure d’une ancienne banque surmontée d’étages de béton était abandonnée depuis plus de 20 ans quand Pur Immobilia et trois autres partenaires en ont fait l’acquisition. Pure folie?
«C’était une belle occasion à cause de l’emplacement, explique Philippe Bernard, président de l’entreprise. Il y avait un squelette de béton de 16 étages avec des droits acquis et des vues. Puisque le bâtiment avait été à l’abandon si longtemps, nous avons eu l’appui de l’arrondissement de Ville-Marie, et les tractations avec le ministère de la Culture se sont bien déroulées.
«C’est sûr que la construction a été plus compliquée qu’on le pensait, poursuit-il. Mais le Bank, qui commencera à être habité en mars prochain, rayonnera. L’immeuble original a été bâti en 1905 et on comprend très bien que la nouvelle construction date de 2013. C’est quelque chose qu’on ne voit pas beaucoup dans le Vieux-Montréal!»
Pur Immobilia et un autre partenaire se préparent à relever un défi encore plus grand: la mise en valeur de l’ancienne gare Viger, dans l’est du Vieux-Montréal.
«C’est un des immeubles les plus emblématiques de Montréal, dit Philippe Bernard. En raison du bâtiment existant et de l’ampleur du projet, nous allons contribuer à revitaliser le quartier. Cela deviendra la charnière manquante entre le Vieux-Montréal, le centre-ville et l’est de Montréal, avec un pôle commercial axé sur les services de proximité et des bureaux. Un volet résidentiel locatif s’ajoutera plus tard.»